La drague Ă©lectorale est ouverte
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« L’essentiel, c’est d’ĂȘtre Ă©lu. AprĂšs, on verra bien »
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François MITTERRAND
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« Ă Nevers, Emmanuel Macron a dĂ©voilĂ© son pass culture de 300 euros pour les jeunes de 18 ans, Ă dĂ©penser en cinĂ©ma, concert, spectacle, musĂ©e, livres, disques, instruments, jeux vidĂ©o ou musique en ligne. Roselyne Bachelot, qui l’accompagnait, a cru bon de faire un mot d’esprit en dĂ©clarant que le cinĂ©ma, « c’est bien pour draguer ». Quelle hauteur de vue pour ce ministre de la Culture ! C’est plutĂŽt le pouvoir, chef de l’Ătat en tĂȘte, qui drague la jeunesse.
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Un journaliste ne s’y est pas trompĂ©, qui a demandĂ© Ă Macron : « Que rĂ©pondez-vous Ă ceux qui vous accusent de draguer les jeunes pour des motifs Ă©lectoralistes ? » Il a bottĂ© en touche en rĂ©pondant que « nous rentrons dans une pĂ©riode oĂč les gens vont mettre ce critĂšre Ă toutes les sauces ». Il est vrai qu’il est expert en la matiĂšre et se montre plus compĂ©tent en chef de sauce qu’en chef de l’Ătat. Les dĂ©tracteurs de la dĂ©mocratie soulignent souvent qu’elle conduit Ă la dĂ©magogie : Macron, Ă l’approche de la prĂ©sidentielle, leur donne raison.
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Ses ministres, qui singent leur maĂźtre, participent activement Ă cette cuisine Ă©lectorale et tiennent leur rĂŽle de commis. Roxana Maracineanu, qui n’est pas contre le port du voile au sport, a dĂ©fendu le choix de Youssoupha pour l’hymne officiel des Bleus, qui est manifestement un signe Ă l’adresse de la jeunesse de banlieue : « C’est un rappeur qui est populaire, qui est engagĂ© contre le racisme, qui a des convictions » et « qui parle aux jeunes », a-t-elle expliquĂ© sur France Info. Gabriel Attal n’a pas trouvĂ© d’autre argument pour justifier ce choix que de dire : « DĂ©jĂ Ă l’Euro 96, Jean-Marie Le Pen avait tenu des propos scandaleux sur les Bleus. »
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Ce ne sont pas les seuls ministres Ă donner dans la dĂ©magogie. L’inĂ©narrable Jean Castex, inaugurant le retour du train de nuit Paris-Nice, a jouĂ© le chef de bord, accueillant les passagers au micro – et devant les camĂ©ras : « Mesdames, messieurs… Je vous souhaite la bienvenue Ă bord du Paris-Nice… » Jean-Michel Blanquer, qu’on croyait plus sĂ©rieux, cĂšde lui aussi Ă la tentation de se donner en spectacle : au mois d’avril, il jouait Ă la marelle dans une Ă©cole de Livry-Gargan. Faut-il que le gouvernement soit incapable de faire des propositions sĂ©rieuses pour se prĂȘter Ă de telles pitreries !
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Certes, la culture doit ĂȘtre dĂ©fendue, mais pas n’importe comment. Il faudrait commencer par la dispenser dans les Ă©tablissements scolaires. L’annonce de cette aide financiĂšre Ă la jeunesse ressemble beaucoup au clientĂ©lisme officiellement pratiquĂ© dans la Rome antique. Elle relĂšve aussi de la pratique du « panem et circenses » (pain et jeux du cirque), dans l’empire dĂ©cadent, selon la formule empruntĂ©e au poĂšte latin JuvĂ©nal.
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L’exĂ©cutif, pour tenter de se maintenir au pouvoir, cherche Ă se concilier une partie de la population par des faveurs et des actions de communication, mais ces manĆuvres sont si grossiĂšres qu’elles risquent fort d’avoir l’effet contraire.
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Quand un gouvernement, Ă l’approche d’Ă©lections importantes, ne trouve d’autre mĂ©thode de campagne que de draguer tous azimuts et de diaboliser le Rassemblement national, c’est qu’il se trouve en mauvaise posture : voilĂ , finalement, une bonne nouvelle !
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Philippe KERLOUAN
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