> > Toi, oui toi ! Le petit "Pied-Noir", qui reste accroché à
> > ton mouchoir et qui, depuis 62, l'agite comme pour dire au> > revoir!
> >
> > Ta terre n'est plus en vue. Depuis longtemps ! C'est foutu
> > !Tu ne reverras plus chez toi, ni les douars, ni Lakhdar.
> >
> > C'est trop tard. Ton bateau est ancré au milieu de nulle
> > part.
> >
> > Autour de toi il n'y a qu'horizon. Va falloir te faire une
> > raison.
> >
> > Les années ont passé, va falloir accoster, et pour toujours
> > tirer un trait.
> >
> > Tu t'es trop attardé, tes yeux se sont usés sur cette ligne
> > imaginaire qui t'a fait espérer.
> >
> > Même la Vierge Noire n'a rien pu faire pour toi.
> >
> > Ni pour eux. Ces "autres" qui sont partis, assommés de
> > chagrin, pour mourir dans un coin.
> >
> > Il n'en reste pas beaucoup, vous n'êtes plus très nombreux.
> >
> > Je crois même que tu es un des rares survivants à être né
> > "là-bas".
> >
> > "Là-bas" c'est ce pays synonyme d'abandon, de départ et
> > d'adieu.
> >
> > Alors ne reste pas là ! Et viens nous raconter, El-Biar, les
> > Aurès, Cap-Falcon et Oran.
> >
> > On écoutera même cet Alger "fanfaron", le pont sur le
> > Rummel, et Bône si t'as le temps
> >
> > Les belles orangeraies, les fruits du Père Clément.
> >
> > Et le Mascara rouge sur la table le dimanche.
> >
> > Je te préviens quand même, l'histoire de gens heureux
> > n'intéresse pas grand monde.
> >
> > Mais quand tu vas parler, on va lire ton regard, embrumé
> > comme Tahat au sommet du Hoggar.
> >
> > On va enfin comprendre ce qu'est être amoureux.
> >
> > On sera d'abord deux, toi et moi si tu veux, et puis ils
> > vont venir, les enfants, revenir, les aïeux, attirés par tes
> > yeux brillant de mille feux.
> >
> > Alors ne reste pas au milieu du néant. Ne laisse pas
> > n'importe qui raconter n'importe quoi ! Jette-le ce mouchoir
> > !
> >
> > Pour que le monde sache ! Pour tous ceux qui sont morts...
> > Pour ne pas qu'on oublie.
> >
> > Dis-leur que "là-bas" a un nom !
> >
> > Celui d'un beau pays qui s'appelle Algérie.
> >
> > Orphelin d'un autre beau pays, ce foutu pays de France.
> >
> > Et comme disait Camus : de l’Algérie on ne guérit jamais.
> >
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