lundi 7 avril 2025
Le gouvernement des juges versus le peuple souverain
La condamnation de Marine Le Pen à une peine d'inéligibilité avec exécution provisoire
constitue un véritable séisme politique, voire un point de bascule dans le fonctionnement
de la démocratie française, maltraitée par des dérives continues installées depuis
plusieurs années par notre République, mais brutalisée aujourd'hui par une décision
lourde de conséquences pour son plein exercice. Car l'épisode présent n'est que le
dernier d'une longue liste de décisions déniant les principes, les valeurs mêmes de la
démocratie et une évidence s'impose : le peuple souverain ne doit pas pouvoir s'exprimer
pour déterminer son avenir. Pourtant, l'article 3 de notre Constitution précise que « la
souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la
voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer
l'exercice ». Or, il faut bien admettre que cette dernière décision des juges empêcherait de
facto des millions de citoyens appartenant au peuple souverain, de voter pour leur
candidate déclarée à la prochaine élection présidentielle. Ce pouvoir exorbitant des juges
ne met-il pas en danger le fonctionnement de notre démocratie et la décision prise à
l'encontre de la candidate du Rassemblement national (RN) est-elle vraiment conforme à
l'état de droit auquel ils se réfèrent ? L'état de droit ne commande-t-il pas que tous les
citoyens soient traités de la même manière notamment au moment du choix de leur
candidat à la fonction suprême ? Si ce n'était pas le cas – la décision des juges semble
cependant l'accréditer – serions-nous encore dans un Etat de droit ?
Incontestablement la décision prise par le tribunal correctionnel de Paris, le 31 mars 2025,
est non seulement politiquement lourde de conséquence pour le déroulement de la future
élection présidentielle mais, de l'avis même de personnalités reconnues en matière de
droit et notamment de droit constitutionnel (ex-membres honoraires du Conseil
constitutionnel), elle est juridiquement très discutable, voire infondée. Car cette décision
est contraire à celle prise par le Conseil constitutionnel, trois jours plus tôt, le 25 mars
2025, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dans une autre
affaire qui portait précisément sur l'exécution provisoire d'une peine d'inéligibilité et qui,
lorsqu'elle est prononcée par les juges, est d'effet immédiat, le justiciable ne pouvant plus
se porter candidat à une élection. De ce fait, le droit au recours et le droit d'éligibilité sont
inéluctablement affectés. Le Conseil constitutionnel a donc analysé la notion de droit
d'éligibilité qui est garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du
citoyen et par l'article 3 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel devait alors dire si
l'exécution provisoire d'une inéligibilité était conforme ou pas à la nature des mandats
politiques et surtout à la liberté de l'électeur. Sa réponse à cette question essentielle est
instructive : « sauf à méconnaître le droit d’éligibilité garanti par l’article 6 de la Déclaration
de 1789, il revient au juge, dans sa décision, d’apprécier le caractère proportionné de
l’atteinte que cette mesure d’exécution provisoire de la peine d’inéligibilité est susceptible
de porter à l’exercice d’un mandat en cours et à la préservation de la liberté de
l’électeur ». Il est indéniable que l'évocation de l'atteinte à la préservation de la liberté de
l'électeur fait référence aux élections futures et a fortiori, à l'élection présidentielle. Si ce
n'était pas le cas, la référence à la liberté des électeurs n'aurait pas été faite. La réponse
fournie par le Conseil constitutionnel à cette QPC a une portée générale dépassant le cas
soumis. En effet, elle englobe tous les mandats électifs et concerne donc bien l'élection
présidentielle. Enfin, les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun
recours et s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et
juridictionnelles conformément à l'article 62 de la Constitution. L'exécution provisoire de
l'inéligibilité appliquée à Marine Le Pen méconnaît donc la réserve émise par le Conseil
constitutionnel.
Mais au-delà de l'interprétation très discutable de cette réserve énoncée par le Conseil
constitutionnel, les juges n'ont-ils pas, de surcroît, par certains attendus de leur jugement,
outrepassé le droit que leur confère leur fonction en justifiant leur décision par des
arguments de portée politique et non plus de droit ? Car objectivement peut-on douter un
instant de la nature politique de certains arguments ? Sans nous attarder sur celui de la
récidive qui est inattendu, incohérent et incompréhensible, la candidate du RN n'étant plus
députée européenne, ni présidente d'un parti – ce qui laisse à penser que les juges font fi
de la loi dans le cas présent – on ne peut qu'être troublé, si ce n'est scandalisé, par celui
du trouble à l'ordre public ou celui de l'atteinte aux intérêts de l'Union européenne (UE)
utilisés par les juges. En effet, le fait que Marine Le Pen soit candidate à l'élection
présidentielle et qu'elle puisse être élue constituerait pour les juges un trouble irréparable
à l'ordre public démocratique qu'il faut faire cesser, selon les termes mêmes du jugement.
Ce motif pour justifier l'exécution provisoire d'inéligibilité est bien politique et traduit la
volonté des juges de décider qui peut se présenter à l'élection présidentielle ou pas à la
place du peuple souverain. On ne peut s'empêcher de faire le rapprochement avec les
différentes prises de position du syndicat de la magistrature (un tiers des magistrats) et
notamment son communiqué de juin 2024, après les élections européennes, dans lequel il
« appelle l'ensemble des magistrats, ainsi que tous ceux qui participent à l'activité
judiciaire, à se mobiliser contre l'accession au pouvoir » de ceux qu'il qualifie d'extrême
droite. Cette ingérence politique et antidémocratique de ce syndicat n'est pas tolérable.
Quant à l'argument sur l'UE, les juges considèrent que « l'atteinte aux intérêts de l'Union
européenne revêt une gravité particulière dans la mesure où elle est portée, non sans un
certain cynisme, mais avec détermination, par un parti politique qui revendique son
opposition aux institutions européennes ». Les juges font ici preuve d'une audace
sidérante en motivant leur décision sur des fondements exclusivement politiques car il
serait illégal de porter un jugement ou d'avoir une opinion divergente de la leur. Le rôle du
parlementaire se limiterait donc à n'avoir ni opinion, ni convictions et à voter comme il faut.
Mais n'est-ce pas là la négation de la démocratie ? Les juges ne s'emparent-ils pas du
pouvoir politique et ne sommes-nous pas en présence d'un abus de pouvoir ?
Les conséquences politiques de cette décision des juges sont donc lourdes sur le
déroulement démocratique du processus électoral car elle compromet sérieusement la
candidature de Marine Le Pen à l'élection présidentielle de 2027, le jugement du tribunal
correctionnel de Paris la forçant à abandonner la course. Est-elle pour autant
définitivement éliminée ? En tout cas, d'autres responsables politiques se sont vu
reprocher par la justice des griefs similaires à ceux touchant la candidate du RN et il sera
intéressant de voir le sort qui leur sera réservé. Le Premier ministre a été « troublé » par
l'énoncé du jugement à l'encontre de cette dernière estimant que l'affaire des assistants
parlementaires européens était fondée sur une accusation injuste. Il faut dire que lui
même a été confronté aux mêmes accusations. Relaxé en première instance en 2024, le
parquet a cependant fait appel. Quant au chef des Insoumis, il a fustigé la condamnation
de Marine Le Pen considérant que « la décision de destituer un élu devrait revenir au
peuple ». Il est cependant, lui aussi, soupçonné d'avoir embauché des assistants
parlementaires lorsqu'il était député européen pour l'épauler dans le cadre de son activité
politique nationale. L'enquête le visant, ouverte en 2018, demeure encore au stade de
l'information judiciaire. Alors, d'autres décisions d'exécutions provisoires d'inéligibilité
seront-elles prononcées ?
En réalité, cette affaire, qualifiée par certains de coup d'Etat judiciaire, traduit le lent
basculement, l'effroyable désorganisation, la sinistre destruction de notre société,
processus engagé à bas bruit mais inlassablement par une idéologie gauchiste depuis le
début des années 1980 qui a infiltré et pris les rênes de nombreuses de nos institutions,
notamment celles communément désignées sous le vocable de gouvernement des juges
ou d'Etat profond. Cette dérive permise par des élites politiques complices ayant renoncé
à exercer leurs responsabilités a abouti à une dénaturation de la démocratie qui menace
aujourd'hui ceux qui ne pensent pas comme il faut et se radicalise au point d'entraver
l'expression de la souveraineté du peuple au nom d'un état de droit totalement dévoyé.
C'est ainsi que ceux qui brandissent sans relâche cet état de droit refusent au peuple
souverain de pouvoir s'exprimer sur des sujets qui conditionnent pourtant son avenir
comme celui de l'immigration invasive à l'origine de tant de maux et de souffrances et qui
menace notre nation. Le simple fait d'évoquer ce problème existentiel vous classe
immédiatement chez les racistes, les fascistes, les xénophobes, les factieux, les séditieux.
Il y a donc une certaine logique à empêcher Marine Le Pen d'accéder au pouvoir, d'autant
plus qu'elle faisait la course largement en tête dans les derniers sondages.
Cette idéologie gauchiste, opérant masquée depuis plus de quatre décennies, est à
l'origine de nombreuses dérives et a fragilisé notre démocratie au point de la dénaturer en
encourageant insidieusement l'inversion des valeurs qui conduit le système, au nom du
pluralisme, à faire taire tous ceux qui ne pensent pas comme lui. Le cas de Marine Le Pen
est le dernier épisode d'une longue liste d'événements graves qui ont faussé le
fonctionnement de notre démocratie et bouleverse la vie du peuple français qui ne
reconnaît plus son pays. Le référendum de 2005 débouchant sur le refus exprimé par le
peuple souverain du traité constitutionnel européen constitue l'exemple le plus
emblématique du déni de la démocratie et confirme le fait que, selon ceux qui se réfèrent
en permanence à l'état de droit, ce n'est pas au peuple de décider. Par ailleurs, en 2017,
c'est un autre déni de démocratie qui a marqué l'élection présidentielle avec un coup
d'Etat institutionnel débouchant sur un hold-up démocratique qui a privé de la victoire le
candidat de la droite donné, lui aussi, gagnant. En 2022, c'est l'instrumentalisation de la
guerre en Ukraine qui a dépossédé les Français d'une campagne électorale normale et
permis que rien ne change. Et pour 2027, la candidate, donnée largement en tête
aujourd'hui, est écartée par l'exécution provisoire d'inéligibilité décidée par les juges. Que
dire, enfin, de la déclaration récente de l'ancien président du Conseil constitutionnel
affirmant qu'un référendum sur l'immigration serait inconstitutionnel ? Toutes ces dérives
alimentent beaucoup de frustrations, de souffrances et de colère contenue jusqu'ici chez
une grande partie des citoyens. Nos dirigeants politiques ne devraient pas l'ignorer.
On le constate, notre démocratie est désormais ravagée par une crise grave de la
représentativité et par une mise à l'écart du peuple de son propre destin. Le
gouvernement des juges – que ce soit ce qu'on nomme habituellement l'Etat profond, que
ce soit une partie des magistrats du siège, que ce soit le Conseil d'Etat ou le Conseil
constitutionnel – participe par certaines de ses décisions à ce déni de démocratie en
s'installant manifestement contre le peuple souverain, contre sa volonté et ses aspirations.
Or, nier au peuple tout droit à une expression légitime peut conduire à transformer sa
colère en violence, ce qui n'est pas souhaitable. Ce n'est d'ailleurs pas dans la culture des
sympathisants de droite qui pourraient cependant, à l'instar de ceux de gauche qui savent
occuper la rue sous n'importe quel prétexte, manifester massivement et pacifiquement
dans certaines circonstances pour dénoncer les dérives et faire pression sur les pouvoirs
publics pour défendre notre démocratie. Il appartient aux responsables politiques de droite
d'élaborer une stratégie politique d'union dans ce sens. Après tout, si la gauche a jusqu'ici
le monopole de la rue, la droite doit le lui contester pour que le peuple recouvre sa
souveraineté arbitrairement confisquée par le gouvernement des juges. « En France, la
Cour suprême c'est le peuple » (général de Gaulle)
Le 06 avril 2025
Antoine MARTINEZ (général 2s
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